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Au sortir de la nuit

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pleur-de-lys's avatar
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Nous sommes les enfants fous, ceux qui n’ont pas de père, ou alors si loin que le visage s’estompe, la voix ne porte plus, et les couleurs sont fades à s’entrouvrir les veines à coup de vieux tessons que les larmes ont polis et dont les années blanches ont raccourci les crocs. Mes frères, je ne suis plus des votre, je ne suis plus des votre car mon esprit s’enlise dans le non être confus, dans l’atonie muette de tout ceux qui m’entourent. Je ne suis plus des votre et mon cœur ne bat plus sur les rythmes alentis des tangos d’autrefois, sur les musiques qui disent, et qui parlent et qui t’aident à crever, à retourner la merde, à faire gicler le mal, à retourner la peau, et dessous c’est plus noir encore. Car dessous maintenant c’est le  vide, c’est le rien, il n’y a plus l’enfer, il n’y a plus mal-être, il n’y a plus venin ou morsure, il n’y a plus débauche ou déchirure. Dessous la peau, le vide, dessous la peau la chair, rien d’autre, rien de plus, rien de moins, dessous la peau c’est moi et c’est les autres, c’est tout le monde, c’est la médiocrité crasse, c’est l’absence de muse qui me fait ressembler à lui, elle ou bien eux qu’hier encore je montrait du doigt, d’un doigt qui maintenant crève de ne pas pouvoir tracer les signes d’hier, les marques des catins, les runes oubliés et les cercles parfaits. Ce doigt qui maintenant s’agite comme la baguette d’un chef d’orchestre soul devant un public de singes savant qui ne savent pas pourtant qui ils sont, ce qu’ils valent, ce qu’ils veulent, quelle est leur destinée. Sans savoir que leur vie est peinte dans un cadre, sur une toile jaunie, dans quelque vieux grenier, et qu’un peintre inconscient à confié à l’histoire.
Mes frères, conservez en vous les encres lacrymales, les souvenirs menteurs, les amours écorchées et les violences rouges des âmes éraillées, mes frères n’oubliez rien, pas même ce qui n’arriva pas, pas même ce qui ne fut pas vous.  Mes frères, souvenez vous de tout, surtout de la douleur, surtout des jours anciens et des pulpes crachées aux visages de la foule, des mamelles du monde que vous avez honnies.
Au sortir de la nuit, plus rien n’est consistant. Chaque chose perd son essence, et quand on veut saisir, c’est toujours moite et mou, c’est toujours puant et doux, tellement écœurant de bonté feinte et d’uniformité…
Ce matin, je le sais, il faut partir à nouveau, trouver de nouvelles routes, retracer un chemin, sortir du labyrinthe. Sans quoi je mourrais heureuse.

Et c’est intolérable.
Un de mes derniers textes... à défaut de faire du nouveau on brasse des thèmes éculés...
© 2008 - 2024 pleur-de-lys
Comments9
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Secular's avatar
"je montraiS",
"saoul",
"qu'un peintre a confié"... :)


J'aime beaucoup la chute, le reste aussi, mais surtout la chute.